On ne brade pas le CHUV, ni en bloc ni en tranches

L’invité s’oppose à la volonté de transférer au privé des activités rentables du grand hôpital vaudois. La conseillère d’État chargée de la sécurité dirige la gendarmerie, qui contrôle et accrédite par ailleurs les sociétés privées de sécurité. Cela ne fausse-t-il pas la «concurrence»? Ne faut-il pas nommer un conseil d’administration de la gendarmerie en lui octroyant au passage le pouvoir de distribuer certaines de ses tâches aux sociétés privées?

Un tel projet paraîtrait absurde. C’est pourtant ce que proposent, pour le CHUV, un député libéral avocat des cliniques privées, un préfet en vacances et en campagne électorale ainsi que des organisations patronales, notamment.

Certes, la loi fédérale mélange dans le secteur hospitalier les principes de concurrence et de planification. Mais la Constitution fédérale confie bien aux Cantons la responsabilité de garantir les soins à la population. Et ils ont le choix des moyens. Les Vaudois ont choisi de donner la mission de dernier recours et les tâches spécialisées à un service public directement rattaché au Conseil d’État. Les faits ont montré que c’est rationnel et efficace.

«Le Conseil d’État, élu par le peuple, assume les fonctions d’un conseil d’administration»

Dans ce modèle, c’est le Conseil d’État, élu par le peuple, qui assume les fonctions d’un conseil d’administration. Il s’appuie sur des services transversaux compétents et indépendants du CHUV en matière de finances et d’audit. Le Conseil d’État est lui-même contrôlé dans son rôle par les commissions de gestion et des finances du parlement. Ainsi, il n’y a pas de confusion des rôles entre le directeur, un conseil d’administration et le Conseil d’État, comme on en a vu dans tous les cantons qui ont opté pour le modèle de la droite libérale vaudoise.

Prenons juste un exemple, le canton de Saint-Gall. Le conseil d’administration qui y gère les hôpitaux a décidé de fermer cinq sites de soins aigus. Or les autorités et le peuple venaient de voter 135 millions d’investissements dans ces hôpitaux, dont 50 déjà dépensés. Émotion donc chez nos amis Confédérés. Et tout le monde de demander en chœur, y compris la droite libérale: «Mais que fait le Conseil d’État?» Et le Conseil d’État de répondre: «C’est pas nous, c’est le conseil d’administration.»

Il a fallu créer un comité mixte Conseil d’État-conseil d’administration pour chercher une issue à la crise. Pendant ce temps, le peuple doit se demander pourquoi on élit des autorités si celles-ci doivent se quereller avec un conseil d’administration nommé par elles pour régler des questions aussi importantes. Bel exemple, en tout cas, de clarté libérale dans la répartition des rôles…

À la fin, cette complication proposée par les cliniques privées vaudoises et ceux qu’elles influencent n’a qu’un but: découper des tranches d’activité rentables dans le CHUV et les transférer au privé. C’est à cela que doit servir leur conseil d’administration.

Il faut espérer que le peuple donne, le moment venu, une réponse claire à cette obsession intéressée: on ne brade pas le CHUV, ni en bloc ni en tranches. (24 heures)

24 Heures, 13.03.2019, Pierre-Yves Maillard

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