AVS21: les femmes donnent de la voix

Après la votation de dimanche, la résistance s’organise, entre manifestation à Berne, pétition et préparation de la Grève féministe en 2023.
Plusieurs centaines de femmes de gauche se sont réunies lundi à Berne.

Au lendemain de l’acceptation sur le fil de l’élévation de l’âge de la retraite des femmes dès 2024, les femmes de gauche ont fait entendre leur voix. Plusieurs centaines d’entre elles se sont réunies hier à midi à Berne. Le «oui», dimanche, du peuple suisse constitue «un grand pas en arrière en matière d’égalité», ont-elles dénoncé.

Les Femmes socialistes et leurs coprésidentes, Tamara Funiciello et Martine Docourt, ont appelé à cette action sur la place de la gare. Il n’est pas antidémocratique de manifester contre un résultat de votation, a lancé Tamara Funiciello à la foule. Ce qui est antidémocratique, c’est plutôt que l’égalité inscrite depuis quarante ans dans la Constitution ne soit toujours pas appliquée.

«Déclaration de guerre»

«Ce qui a été décidé hier est une honte», s’est exclamée la Bernoise. L’action de protestation de lundi est «la première déclaration de guerre à l’intention des hommes blancs, riches et âgés» qui ont décidé que les femmes devaient travailler plus longtemps, a-t-elle poursuivi. «Les femmes portent cette société gratuitement», a affirmé Tamara Funiciello. Les politiques ont visiblement oublié la dernière grande grève des femmes de 2019 et ses revendications. Il est temps de leur rafraîchir la mémoire, a-t-elle ajouté.

Réunies en assemblée lundi soir, les militantes de la Grève féministe préparent également une mobilisation romande. Elles ont choisi d’organiser une seule grande manifestation, dont le lieu et la date seront prochainement communiqués. Il n’y aura pas de rassemblements décentralisés aujourd’hui comme le collectif l’avait d’abord annoncé.

Déclaration en ligne

Et de nombreuses personnes ont exprimé leur mécontentement en signant en ligne la «Déclaration du 25 septembre», lancée par l’Union syndicale suisse (USS). Hier en fin de journée, le texte exigeant «de meilleurs revenus pour les femmes, au cours de la vie professionnelle et à la retraite» frisait les 100 000 paraphes récoltés en moins de 24 heures. «En Suisse allemande particulièrement, les partis de droite et les milieux économiques n’ont pas arrêté de dire qu’ils reconnaissaient le problème des inégalités, mais que celui-ci devait être résolu par d’autres moyens. On attend maintenant qu’ils tiennent parole», souligne Gabriela Medici, secrétaire centrale à l’USS.

En ligne de mire des syndicats, les débats au Conseil des États hier sur le pouvoir d’achat et l’adaptation des primes AVS au renchérissement du coût de la vie. La décision de la Chambre haute de compenser pleinement les rentes, a été accueillie avec soulagement. L’USS appelle le Conseil fédéral à mettre au plus vite en œuvre les décisions du parlement. «Sans mesure de compensation, avec l’inflation, l’augmentation des primes et celle de la TVA, un ménage de retraité·es perdrait un pouvoir d’achat de l’équivalent d’une rente mensuelle avant l’entrée en vigueur d’AVS21», estime la secrétaire centrale.

Conseil des États en ligne de mire

Les regards sont également tournés vers les travaux du Conseil des États sur la réforme du deuxième pilier, aujourd’hui particulièrement défavorable aux femmes. Le compromis des partenaires sociaux a jusqu’ici été torpillé dans les deux chambres. Par ailleurs, l’USS place ses espoirs dans l’initiative pour une treizième rente AVS, qui sera discutée au parlement en décembre.

«Il faut également augmenter les salaires dans les métiers typiquement féminins et permettre une meilleure participation des femmes sur le marché du travail», souligne Gabriela Medici, en mentionnant l’initiative du Parti socialiste visant à garantir à chaque enfant le droit à une prise en charge extrafamiliale.

Les inégalités stagnent depuis 10 ans et ce n’est pas tolérable, dénonce la secrétaire centrale. Il y a un peu plus de deux semaines, le rapport du Conseil fédéral sur les inégalités fédérales dévoilait pour la première fois l’écart global de revenus du travail entre femmes et hommes. Celui-ci prend en compte le revenu pour l’ensemble des heures de travail accomplies de 15 à 64 ans. Sur tout leur parcours, les femmes gagnent 43,2% de moins que les hommes, avec un impact important sur les rentes. AVEC L’ATS
Rentes AVS adaptées au renchérissement

Contre l’avis du Conseil fédéral, les sénateurs ont décidé une indexation complète des retraites en 2023.

Les rentes AVS devraient être intégralement adaptées au renchérissement d’ici 2023. La Chambre des cantons a accepté hier deux motions du Centre et du PS, contre l’avis du Conseil fédéral. Le National en avait fait de même mercredi dernier.
La hausse des prix de l’énergie pèse sur le porte-monnaie des Suisses. Les partis sont unanimes à dire qu’il faut des mesures de soutien. Une bonne douzaine de propositions étaient sur la table. Seules deux au contenu similaire ont passé la rampe par 24 voix contre 17, à une voix près pour la deuxième, grâce à une alliance du Centre et du PS.

Pirmin Bischof (Centre, SO) et Paul Rechsteiner (ps, SG) veulent une adaptation extraordinaire des rentes de l’AVS et de l’AI de manière à compenser intégralement le renchérissement d’ici au 1er janvier 2023 au plus tard. L’adaptation des rentes devrait en outre être régulière en cas de renchérissement supérieur de 2% en un an.

Aujourd’hui, les rentes sont adaptées sur la base de l’indice mixte, à savoir en fonction de l’évolution des prix et des salaires. Pour Pirmin Bischof, les retraités seront pénalisés par l’inflation de cette année alors que les salaires eux augmentent à peine.

Andrea Caroni (plr, AR) a critiqué une mesure pas assez ciblée. En outre, le système d’indice mixte a jusqu’à présent fait ses preuves. Un point confirmé par le chef du Département fédéral de l’intérieur Alain Berset.

Ce mécanisme a permis aux rentes de monter de 19% entre 2000 et 2021 alors que le renchérissement n’a été que de 8%, a rappelé le ministre. Le National devra se prononcer encore une fois sur les deux motions des conseillers aux États, l’intitulé étant très légèrement différent. Mercredi dernier, il avait accepté de justesse cette proposition.

A noter que les rentes doivent être indexées le 1er janvier 2023 conformément à la règle d’une adaptation prévue tous les deux ans. Cette indexation peut être faite exceptionnellement une fois l’an en cas de forte inflation qui dépasserait les 4% par an.

Le Conseil des États préfère temporiser sur deux autres motions du PS et du Centre visant à amortir le choc de l’augmentation des primes-maladie. Par 21 voix contre 19, il a renvoyé en commission les deux textes à nouveau semblables de Marina Carobbio (ps, TI) et d’Isabelle Chassot (Centre, FR).

Le Courrier, 26 septembre 2022, Sophie Dupont

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