L’AVS plus avantageuse !

Cotiser pour une treizième rente AVS comme prévu par une initiative est plus profitable que se constituer un troisième pilier, selon une étude de l’Union syndicale suisse. Non seulement l’AVS est plus sociale, mais contribuer à l’AVS serait également plus économique que se constituer un troisième pilier pour la plupart des salarié·es.


C’est le résultat d’une étude de l’Union syndicale suisse (USS), qui a comparé le coût du premier pilier et celui de la prévoyance privée.

L’étude vient appuyer l’initiative de la faîtière syndicale pour une treizième rente AVS aboutie en juin, alors que la pression sur les rentes est de plus en plus forte. «Les rentes AVS sont trop basses pour vivre et perdent de plus en plus de valeur par rapport au renchérissement du coût de la vie. Celles du deuxième pilier sont en chute libre», souligne Gabriela Medici, première secrétaire adjointe de l’USS. Avec son étude, la faîtière syndicale a souhaité également «contrer une offensive publicitaire massive pour le troisième pilier» comme solution à l’affaiblissement des rentes. Au parlement, les deux Chambres ont demandé une augmentation du montant maximal des cotisations au troisième pilier.

Un comparatif

L’analyse de l’USS compare le montant des cotisations – à l’AVS et au troisième pilier – et le rapporte aux rentes attendues. Elle a pris comme base de calcul des personnes de 21 ans en début de parcours professionnel. Selon ses conclusions, une femme seule avec un revenu médian verse pendant sa carrière 300’000 francs à l’AVS (en se référant aux montants 2020) pour obtenir sa rente de 1er pilier. Si elle devait obtenir le même montant en prévoyance privée, cela lui coûterait entre 200’000 et 250’000 francs de contribution en plus. Les hommes seuls avec un salaire médian sont également avantagés avec les contributions à l’AVS.

Les deux Chambres ont demandé une augmentation du montant maximal des cotisations au troisième pilier

Pour les familles (couples mariés avec deux enfants), l’écart est encore plus important. «Pour obtenir une rente identique en prévoyance privée, les familles avec un revenu médian devraient cotiser plus du double de ce qu’elles contribuent pour l’AVS, soit 790 francs par mois en plus», indique Gabriela Medici. Elle note que jusqu’à un certain niveau, les hauts revenus profitent également davantage du premier pilier: selon les calculs de l’USS, l’AVS est plus avantageuse que la prévoyance privée pour 90% des familles.

Patronat vent debout

Pour l’organisation faîtière, ces résultats plaident en faveur d’une treizième rente AVS, qui résulterait en une hausse moyenne de 8,33% des prestations. «Même en finançant la treizième rente par l’augmentation des cotisations salariales, cela reste avantageux par rapport au troisième pilier», indique la première secrétaire adjointe. La treizième rente coûterait 45 francs par mois aux salarié·es (médiane), selon ses calculs. Pour une prestation équivalente dans la prévoyance privée, les femmes devraient payer 176 francs par mois et les hommes 144 francs, calcule encore la faîtière. «Quand bien même les taux de rendements augmentent davantage que les prévisions actuelles, la treizième rente reste profitable pour 80% de la population», assure Gabriela Medici.

Dans ce scénario, seuls les revenus mensuels de plus de 10’000 francs retireraient davantage du troisième pilier. Pour l’USS, l’expansion du troisième pilier prônée par la droite est «une erreur du point de vue de la politique sociale et économique» et est inabordable pour de nombreuses personnes. L’organisation faîtière met en cause le fonctionnement des institutions de prévoyance individuelle, qui visent à maximiser leurs profits et peuvent facturer des frais de gestion exagérés.

Peut-on comparer deux systèmes, l’un basé sur la redistribution, l’autre sur la capitalisation? Responsable romand de l’Union patronale suisse, Marco Taddei fait part de son étonnement. «En comparant l’AVS et le troisième pilier, l’USS compare des pommes et des poires et met à mal un système qui a fait ses preuves», réagit-il. Il rappelle que l’AVS est dans les chiffres rouges depuis 2014 (sauf en 2020, où ses résultats étaient positifs, ndlr). «Nous sommes clairement contre l’initiative pour une treizième rente. L’AVS doit être assainie pour garantir sa pérennité, dans un contexte où les actifs sont toujours moins nombreux pour payer les rentes d’un nombre toujours plus élevé de retraités», affirme-t-il.

LPP: le compromis s’effrite

La semaine dernière, la commission de la sécurité sociale du Conseil national a affaibli le projet du Conseil fédéral pour la réforme du 2e pilier. Celui-ci avait été élaboré avec les partenaires sociaux (Union patronale suisse, Union syndicale suisse et Travail.Suisse). Son modèle prévoit une baisse du taux de conversion minimal de 6,8 à 6% dès l’entrée en vigueur de la réforme. Un capital de 100’000 francs donnera droit à une rente de 6000 francs au lieu de 6800 francs. Les baisses de rentes attendues doivent être compensées de manière ciblée. Contrairement au projet du gouvernement, la commission refuse que tous les rentier·ières touchent un supplément. Seul 35 à 40% d’entre elles et eux en bénéficieraient. Une minorité de la commission soutient le mécanisme du Conseil fédéral. Par ailleurs, la commission ne souhaite pas étendre les suppléments au-delà des quinze premières années. La proposition de la commission coûte-rait ainsi 800 millions de francs par an, contre 1,7 milliard pour le projet du gouvernement.

Pour les Vert·es, la commission fait preuve d’irresponsabilité en torpillant le compromis sur la table entre employés et employeurs. L’Union syndicale suisse a dénoncé un projet qui «laisse tomber les femmes», une baisse des rentes jusqu’à 12% et des allègements fiscaux d’environ un demi-milliard pour les gros revenus. «C’est le pire modèle de réforme possible pour les bas salaires», réagit Gabriela Medici, première secrétaire adjointe de l’USS. «Dans les débats sur l’AVS, la droite a prétendu que l’écart de rentes des femmes devait être résolu à travers la révision du deuxième pilier. Mais elle n’a rien fait en ce sens», conclut-elle. ATS/SDT

Le Courrier, 2 novembre 2021, Sophie Dupont

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