La Santé… ce n’est pas la santé !

Une enquête de l’Office fédéral de la statistique pointe les conditions de travail délétères auxquelles sont soumis-e-s les salarié-e-s œuvrant dans la santé et le social. (1) L’Office fédéral de la statistique (OFS) vient de publier une étude qui livre quelques données pouvant être utiles pour une action syndicale.


Elles sont basées sur un module de l’Enquête suisse sur la santé (ESPA), relevé en 2020, portant sur les accidents de travail, ainsi que sur les risques pour la santé au travail et sur les problèmes de santé liés au travail.

Travailler peut nuire à la santé
Le constat principal: en 2020, 12% de la population âgée de 15 à 74 ans et ayant exercé au moins une fois au cours de la vie une activité professionnelle, déclarent souffrir de problèmes de santé causés ou renforcés par leur travail. Cette proportion n’a pas changé par rapport à 2013. Parmi les secteurs où l’exposition des travailleuses et travailleurs à des problèmes de santé – physique ou mentale – est la plus élevée, on trouve la branche « Santé humaine et action sociale ».

Au cœur des demandes sociales
Environ une femme sur quatre active professionnellement travaille dans la branche Santé humaine et action sociale. Cette branche regroupe, premièrement, le domaine de la santé humaine (hôpitaux, soins à domicile, cabinets médicaux, etc.), deuxièmement l’hébergement médicosocial (EMS pour personnes âgées) et social (comme les établissements pour personnes handicapées), troisièmement l’action sociale sans hébergement, en particulier toutes les activités relevant de la prise en charge de la petite enfance. Cette branche recoupe pour une large part le domaine du care « formel »; elle est en croissance régulière depuis de nombreuses années. Elle est directement à l’articulation de demandes sociales (À quels soins, de quelle qualité avons-nous droit ? Quelle est la qualité de vie de nos aîné-e-s ? Que fait la société pour permettre à des personnes handicapées et à leur famille de vivre le mieux possible ? Les meilleures conditions de développement sont-elles garanties lors de la petite enfance, période cruciale pour chaque individu ?) et des attentes des femmes et des hommes qui y travaillent (Est-ce que je peux faire un bon travail ? Reconnu ? Sans y laisser ma santé ?), la réponse positive aux premières questions dépendant dans une large mesure des réponses positives aux secondes.

Salariées surexposées
De ce point de vue, les résultats du module de l’ESPA sont décourageants: la branche Santé humaine et action sociale est, de toutes les branches, celle dont les salariées sont les plus exposées à la fois à des risques pour leur santé physique et pour leur santé mentale. Parmi les risques physiques, elles doivent souvent porter des objets ou des personnes lourdes (38%) ou prendre des positions douloureuses ou fatigantes (34%). Un constat sans surprise pour celles et ceux qui connaissent ces professions. Cela n’enlève rien au fait que ce sont des sollicitations particulièrement pénibles, source majeure d’usure et d’atteinte à la santé. Du côté des risques pour la santé mentale, les contacts avec ces patient-e-s difficiles (54%), la charge émotionnelle élevée (39%), mais aussi les violences (17%) et le harcèlement moral (11%) sont sensiblement plus fréquents dans cette branche qu’en moyenne (et la moyenne n’est pas synonyme d’idéal…).

Un travail qui épuise
Le constat n’a rien de nouveau: les données de l’enquête suisse sur la santé (ESS) mettaient déjà en évidence cette situation en 2012 et en 2017; surtout, depuis des années, les syndicats et les associations professionnelles dénoncent cette situation et le manque complet de reconnaissance du travail réalisé. Taux d’absentéisme hallucinant dans les hôpitaux, soignant-e-s qui abandonnent en masse leur profession (en 2018, les taux de professionnel-le-s soignant-e-s ayant quitté leur profession tournaient autour de 40%, selon une étude de l’Observatoire suisse de la santé), qualité des prestations de prise en charge qui ne sont pas ce qu’elles devraient et pourraient être…: depuis le début de la pandémie de COVID-19, les effets de cette situation sont mentionnés chaque semaine dans la presse. Mais ils ne sont presque jamais reliés à leur cause directe: des conditions de travail déplorables qui épuisent, physiquement et moralement.

La pression des finances
Ces conditions de travail déplorables renvoient elles-mêmes à leur cause indirecte: un système de santé, et plus largement des services sociaux qui sont défigurés par la contrainte financière exercée sur eux.

(1) OFS (2021), Enquête suisse sur la santé (ESPA) : accidents et autres problèmes de santé liés au travail ; https://www.bfs.admin.ch/bfs/fr/home/statistiques/sante/determinants/conditions-travail.assetdetail.19204489.html

Services publics, 20 octobre 2021, Benoît Blanc, membre SSP

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