Éviter une grave régression sociale à Fribourg

Fribourg : Les syndicats appellent à voter Non à la révision de la Caisse de pension du personnel de l’État. En abaissant le montant des rentes, celle-ci obligera les salarié-e-s à travailler plus longtemps.

«Un recul sans précédent pour les salarié-e-s de la fonction publique». Mardi 13 novembre, le comité opposé à la révision de la Caisse de pension du personnel de l’État de Fribourg (CPPEF) a exposé ses arguments à la presse. Le comité regroupe les syndicats de l’Union syndicale fribourgeoise, dont le SSP, et les Jeunesses socialistes.

BYE-BYE, RETRAITE ANTICIPÉE.
«Une majorité d’employé-e-s de l’État devront travailler entre deux et quatre ans de plus, pour toucher des rentes fortement diminuées», a résumé Gaétan Zurkinden, secrétaire syndical SSP. Selon le cabinet d’experts Prevanto SA, la révision entraînera jusqu’à 18% de baisse de la rente en cas de retraite à 64 ans. Or aujourd’hui, 60% des employé-e-s de la fonction publique fribourgeoise prennent une retraite anticipée, entre 60 et 62 ans. Dans un tel cas de figure, les pertes prendront l’ascenseur: de 20% à 40%. Conséquence: «Si la révision passe, il sera impossible pour une majorité d’employé-e-s de partir avant 64 ans».

FAUSSES PROMESSES…
Présent à la conférence de presse, le conseiller national (PS) Christian Dandrès a fustigé les fausses promesses du Conseil d’État, qui annonce que les pertes de rentes n’excéderont pas les 9,5%, en cas de départ à 64 ans. «Pour arriver à ce chiffre, l’exécutif a supposé que le comité de la CP-PEF créditerait chaque année un intérêt de 2,5% sur les comptes des assuré-e-s. Or il s’agit d’un taux fantaisiste. Dans la pratique, les gestionnaires de la caisse s’attelleront d’abord à constituer une réserve de fluctuation, inexistante aujourd’hui, afin de parer à d’éventuelles pertes boursières. Les intérêts versés aux salarié-e-s seront donc beaucoup plus bas, et la perte financière nettement supérieure à la prévision officielle», a expliqué M. Dandrès.

… ET VRAIE RÉGRESSION.
Si le Conseil d’État vante un «projet équilibré», le camp du Non dénonce de son côté une «asymétrie totale des sacrifices». Selon l’étude Prevanto, 80% des coûts pèseront sur les épaules des salarié-e-s, contre seulement 20% pour l’État. «Il est paradoxal de demander aux salarié-e-s un tel effort financier, alors qu’en parallèle le Canton vient d’accorder des baisses fiscales aux grandes entreprises et aux contribuables les plus fortunés», résume M. Dandrès.
Pour Agostino Soldini, secrétaire central SSP, «un projet qui prévoit de travailler plus pour gagner nettement moins est inacceptable pour un syndicat digne de ce nom». Et le syndicaliste de souligner que l’élévation de l’âge de la retraite entraînée par la révision poussera le chômage à la hausse. Dans un contexte marqué par une grave crise sanitaire et économique, «il s’agirait d’une profonde régression sociale», souligne le syndicaliste. Une régression qui menace aussi le service public d’un «exode de fonctionnaires», qui quitteraient le navire avant l’entrée en vigueur de la contre-réforme, agendée au 1er janvier 2022.
APPEL À LA GAUCHE. Au nom de la Jeunesse socialiste, Léo Tinguely a exhorté l’ensemble de la gauche à «entendre le cri du personnel et s’unir contre cette réforme de droite». Repris par François Ducret, le président de l’Union syndicale fribourgeoise, cet appel n’a visiblement pas été entendu par la Fédération des employé-e-s de l’État (FEDE). Le jour suivant, celle-ci s’est rangée dans le camp de l’employeur en tenant une conférence de presse favorable à la révision.

NÉGOCIER UN NOUVEAU PROJET.
En cas de Non, le Conseil d’État brandit la menace de baisses de rentes encore plus importantes. Les syndicats dénoncent un «chantage inacceptable». À leurs yeux, un refus de la révision exprimerait le rejet d’une grave détérioration des droits de la fonction publique – pourtant aux avant-postes dans la lutte contre la pandémie. Si cette option l’emporte dans les urnes, «il faudra immédiatement reprendre des négociations en vue d’un paquet plus équilibré, moins défavorable au personnel», souligne Gaétan Zurkinden. Un scénario raisonnable au vu de l’excellente santé financière de la caisse de pensions, comme du ménage cantonal.

TRAVAILLER PLUS, TOUCHER BEAUCOUP MOINS
Le 29 novembre, la population fribourgeoise votera sur une modification de la loi sur la Caisse de prévoyance du personnel de l’État de Fribourg (CPPEF). Celle-ci concerne 19 000 salarié-e-s du secteur public et parapublic.Adoptée en juin dernier par le Grand Conseil, la révision prévoit le passage de la primauté des prestations à la primauté des cotisations.Ce changement de système entraînera une baisse des rentes, que le Conseil d’État affirme contrebalancer par des mesures compensatoires, à hauteur de 317,8 millions de francs. Selon les calculs du cabinet Prevanto SA, les pertes de rentes se monteront, en cas de retraite à 64 ans, à 18% pour un-e salarié-e âgé-e de 45 ans – entre 7,5% et 18% pour un-e salarié-e âgé-e entre 35 et 45 ans. En cas de retraite anticipée, les pertes pourront doubler – ce qui obligera une part importante de salarié-e-s à travailler jusqu’à 64 ans.Concrètement, une infirmière âgée aujourd’hui de 52 ans perdrait près de 800 francs mensuels en cas de départ à la retraite à 60 ans, 456 francs par mois si elle prend sa retraite à 64 ans. Pour une employée de nettoyage de 42 ans, la perte serait de, respectivement, 743 francs et 487 francs mensuels. Un-e enseignant-e au cycle d’orientation perdrait 1151 francs par mois en cas de départ à 60 ans.Dans le camp des partisans de la campagne, on compte le Conseil d’État, l’ensemble des partis de droite et la FEDE. Le SSP, les syndicats de l’USF et la Jeunesse socialiste appellent à voter Non. Le Parti socialiste fribourgeois et les Verts doivent encore déterminer leur mot d’ordre.

SSP-VPOD, Eric Rosset, Services publics, page 4,  23.10.2020

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