La fraude chez CarPostal décidée par le conseil d’administration

Le conseil d’administration de La Poste aurait lui-même demandé au responsable des finances et au chef de CarPostal de maquiller les bénéfices du trafic voyageurs, affirme jeudi le Blick.

Pour étayer ses affirmations, le quotidien alémanique se base sur des procès-verbaux internes. Le conseil d’administration aurait donné l’ordre de cacher ces bénéfices pour continuer à percevoir des subventions de la Confédération, alors que cette dernière avait annoncé vouloir fermer les robinets pour les lignes rentables.

Le Blick rappelle que cette affaire, dévoilée en février 2018 par l’Office fédéral des transports, représente le plus gros scandale de l’histoire de La Poste. Pendant des années, CarPostal a dissimulé ses bénéfices, ce qui lui permettait de bénéficier des subventions. La tricherie se chiffre au total à quelque 200 millions de francs.

Appel à la “créativité” des responsables

En 2013, le conseil d’administration aurait pu stopper la pratique, mais il a fait exactement le contraire en exigeant du chef de CarPostal et du chef des finances de se montrer créatifs pour trouver une manière de voiler l’affaire. Le protocole d’une séance en mains du quotidien le montre clairement.

Président de La Poste à l’époque, Peter Hasler se défend: “La question était simplement de savoir si on pouvait déplacer les bénéfices”, explique-t-il. “Personne, dans le conseil d’administration, n’entendait par là des manières hors la loi ou pas correctes”, assure-t-il.

A-t-on fait “péter un fusible” pour protéger le conseil?

Le conseiller national UDC vaudois Jacques Nicolet avait déposé une interpellation sur cette affaire en juin 2018, lors du départ de la directrice de La Poste. Il se demandait alors si Suzanne Ruoff était un fusible pour couvrir le conseil d’administration et son président Urs Schwaller.

Interrogé jeudi par la RTS, il souligne que le conseil d’administration ne peut pas se dédouaner de ses responsabilités. “En l’occurrence, on retombe sur le texte que j’avais déposé”, souligne-t-il. “Je me pose la question de savoir si on n’a pas fait péter un fusible pour protéger le reste du conseil d’administration, Urs Schwaller en tête, même s’il n’était pas président à cette époque. Je crois qu’un conseil d’administration doit assumer les responsabilités des prédécesseurs. En la matière, on se rend compte que le conseil d’administration était impliqué dans ces magouilles.”

Des faits graves et choquants pour les parlementaires

Interrogée dans le 12h30, la conseillère nationale socialiste Valérie Piller Carrard est indignée. “Si les éléments évoqués sont avérés, c’est un véritable scandale”, assène-t-elle. “On a la preuve, avec ces éléments-là, que le conseil d’administration a triché activement. C’est un fait extrêmement grave.”

Pour la Fribourgeoise, l’enquête pénale que Fedpol a engagée contre La Poste doit être élargie à tout le conseil d’administration et tenir compte des nouveaux éléments.

Le conseiller aux Etats PLR Olivier Français est lui aussi fâché. “On est particulièrement choqués de ces mensonges structurés depuis 2013″, réagit-il. “Malgré les ordres très clairs du Conseil fédéral, La Poste - CarPostal en particulier - a triché.”

Pour le Vaudois, le Conseil fédéral et les organes de surveillance doivent contrôler de très près les entreprises de transports publics. Les parlementaires, eux, doivent s’assurer qu’on ne coupe pas dans les moyens alloués à cette surveillance.

Pas d’enquête externe, dit le Conseil fédéral

Le Conseil fédéral ne veut pas d’une enquête externe relative à la surveillance exercée par l’Office fédéral des transports (OFT) sur CarPostal entre 2007 et 2015. Il s’est prononcé jeudi sur une série de postulats de la commission de gestion du Conseil des Etats.

En novembre, cette commission avait tiré à boulets rouges sur la surveillance lacunaire dans l’affaire CarPostal et exigé toute une série d’améliorations.

Le gouvernement accepte de rendre un rapport sur l’affaire. Il est disposé à dresser un bilan global, notamment à “exposer les enseignements généraux qui ont été tirés, les conséquences financières pour la Confédération et certains éléments de la procédure pénale administrative qui donneront lieu à des mesures supplémentaires”.

Il estime en revanche qu’une enquête externe n’apporterait pas de nouvelles conclusions. Sur les bases d’un rapport établi fin 2018, l’OFT a annoncé qu’il adaptait son système de surveillance relatif aux subventions octroyées dans le domaine des transports publics.

RTS - 20 février 2020

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